En cette rentrée scolaire, le ministre de l’éducation nationale Jean-Michel Blanquer demande aux lycées d’élaborer un projet local d’évaluation (PLE). Il s’agit d’harmoniser les pratiques d’évaluation au sein des lycées. L’initiative s’inscrit dans le prolongement de la réforme du bac, qui s’est traduite par sa destruction en tant qu’examen national républicain et sa transformation en contrôle continu local, voire localiste. L’objectif avancé vise à « conforter l’égalité de traitement des élèves ». Le Parti de Gauche 66 considère qu’il n’en sera rien ; il alerte au contraire sur les graves menaces qu’il fait peser sur le service public d’éducation nationale.
Il s’agit en effet d’une redoutable arme, supplémentaire, de destruction massive des fondements de l’Ecole de la République et du métier de professeur. Ce projet cherche d’abord à réduire la liberté pédagogique des enseignants, déjà fortement ébréchée. Sous couvert d’harmonisation, il veut en réalité procéder à l’uniformisation des pratiques d’évaluation, et au-delà, de l’ensemble de la pédagogie. Il renforce la pente inquiétante de « l’évaluonnite aiguë » qui ne cesse de ronger l’acte même de transmission des savoirs. Il aggrave la dérive vers la territorialisation de l’éducation, avec la porte ouverte pour toujours plus d’autonomie locale, ce qui constitue dans les faits l’exact contraire de la liberté pédagogique. Il appesantit encore plus lourdement le tropisme d’une gestion managériale autoritaire et désincarnée.
En fin de compte, ce projet représente la réitération d’un acte de défiance majeur à l’encontre des enseignants. C’est une bien curieuse façon de procéder de la part d’un ministre qui n’a cessé de se targuer d’instaurer une prétendue école de la confiance. Il porte en lui, comme la nuée l’orage, la promesse de mises en tensions permanentes des enseignants dans leur quotidien.
On s’aperçoit des dommages collatéraux de la réforme du bac, pourtant massivement repoussée dans les lycées. Le projet local d’évaluation est un dispositif lourd de menaces tous azimuts. Il pourrait, au mieux, être perçu comme un aveu d’échec de la réforme Blanquer du passage du bac en contrôle continu. Il n’en est hélas rien dans l’esprit du ministre. Bien au contraire, il s’échine à valider et à légitimer à la hussarde cette réforme néfaste et nocive.
Le PG 66 appelle au retrait de ce projet local d’évaluation au lycée. Il apporte son soutien à tous les établissements qui s’y opposeront. Il estime urgent de revenir en totalité sur la réforme du bac afin redonner à ce dernier sa dimension d’examen national, anonyme, égalitaire, c’est-à-dire réellement républicain. Les échéances électorales de 2022 doivent à cet égard servir de levier pour y parvenir et réinstaurer au sein des établissements une sérénité battue en brèche par ce nouveau quinquennat d’airain.
Francis DASPE, co-secrétaire départemental du Parti de Gauche 66
Co-auteur de deux livres sur l’éduction, « L’école du peuple. Pour l’égalité et l’émancipation » (éditions Bruno Leprince, 2012), « Manifeste pour l’Ecole de la 6° République » (éditions du Croquant, 2016)