Tribune parue le 26 janvier 2015 sur Marianne.
La question salariale est à l’origine de l’appel à la grève intersyndicale dans la fonction publique du 26 janvier 2016. Il n’est pas courant qu’elle soit aussi résolument assumée par le monde enseignant. Souvent l’emporte d’abord la préoccupation des élèves et une forme de lassitude, face aux accusations répétées de « corporatisme » dès qu’il s’agit de la défense du salaire. Les enseignants renoncent ainsi fréquemment à défendre leur salaire. Pourtant, de cette défense dépend celle du service public républicain d’éducation. Les revendications salariales des enseignants sont ainsi d’intérêt général.
Le salaire des professeurs s’est considérablement réduit. Un enseignant certifié en début de carrière gagne aujourd’hui 1,2 fois le SMIC. C’était deux fois le SMIC il y a trente ans. Depuis 2010, le gel du point d’indice a conduit en moyenne à la perte de l’équivalent d’un salaire mensuel chaque année. Entre 2000 et 2013 la France détient le record à la baisse de l’évolution du salaire réel des pays de l’OCDE : – 11% ! Dans le même temps, ils augmentaient de 14% en moyenne dans les pays membres de cette organisation. Il est vrai que le salaire net lui même est en baisse sous l’effet de l’augmentation du prélèvement pour pension civile. Loin des discours de François Hollande à propos de la priorité donnée à l’école, l’austérité salariale frappe de plein fouet l’ensemble de la fonction publique. Dans ce domaine comme dans tant d’autres, la politique de l’actuel Président de la République poursuit celle de son prédécesseur.
Après le leurre du « travailler plus pour gagner plus » des années Sarkozy qui s’était accompagné d’un recours plus important aux heures supplémentaires, le gouvernement PS s’est engagé dans l’introduction de primes au mérite : les « indemnité pour mission particulières ». Attribuées par le conseil d’administration des établissements, et donc en dernière instance par le chef d’établissement, leur montant varie d’un collège et d’un lycée à l’autre. Une part de la rémunération des enseignants est donc désormais fixée localement et individuellement. Il s’agit d’une véritable rupture idéologique dont l’objectif est de convaincre les enseignants eux-mêmes que la reconquête de leur pouvoir d’achat passe par d’autres canaux que l’action collective. Au nom de l’adaptation aux nouvelles réalités du métier promue par les libéraux, il leur est suggéré d’accepter de nouvelles « missions » pour améliorer leur pouvoir d’achat en espérant des indemnités souvent dérisoires, austérité oblige.
Heures supplémentaires, missions hors statut, primes au mérite, autant de fausses solutions qui concourent insidieusement au démantèlement de l’ensemble du système éducatif. Elles accompagnent en effet la réduction des postes, la territorialisation du système éducatif, le renforcement de la logique managériale et les atteintes à la liberté pédagogiques, la mise en concurrence des personnels. Aborder la question salariale c’est donc mettre à jour l’ensemble des mécanismes de sape des fondements l’Ecole de la République.
Pour le Parti de Gauche, la question salariale constitue donc un enjeu de tout premier plan. Elle dépasse les enjeux de pouvoir d’achat et de reconnaissance du travail fourni. Elle transcende même la délicate question de l’attractivité du métier à un moment où la promesse du recrutement des 60 000 postes ne sera pas tenue. Pour le Parti de Gauche, la revalorisation financière du métier doit passer par la revalorisation du point d’indice, c’est à dire une hausse égalitaire des salaires pour tous les personnels de l’éducation nationale. Voilà pourquoi nous manifesterons mardi 26 janvier au côté des organisations syndicales revendiquant la hausse des salaires de la fonction publique. Car c’est défendre l’Ecole de la République.